« Le Monde », exemple d’une presse orientée sans en avoir l’air


Dans le numéro du mardi 28 mai, une page entière, photo à l’appui, titrait : « On s’aime, on se marie, c’est aussi simple que cela ». Vous l’aurez compris, l’article en question donnait la parole à quatre couples homosexuels qui avaient prévu de se marier avec tambours et trompettes, à la suite de la promulgation de la loi leur ouvrant le mariage et l’adoption.

C’est bien. Enfin, ça n’aurait pas posé problème si ledit quotidien n’avait pas passé son temps et outrepassé ses prérogatives d’information pour défendre le mariage pour tous. Attention, il n’est question ici que de l’objectivité journalistique, et en aucun cas de la loi en elle-même – qui a suffisamment fait débat, y compris sur ce blog. L’objectivité, voilà un concept qui doit commencer à se ronger les sangs.

Souvenez-vous, nous en avions déjà parlé, sur le même sujet, à propos d’un autre magazine.

Pour en revenir au cas du Monde, on se rappellera aussi la réaction de son directeur en découvrant la publicité pleine page pour La Manif Pour Tous, mi-mars. Celui-ci avait d’ailleurs menacé le personnel responsable de cette « faute professionnelle » d’un renvoi pur et simple, estimant qu’ils n’étaient « pas dignes de travailler » pour le quotidien. Venant d’un titre qui se veut irréprochable au niveau de la qualité journalistique – donc de l’objectivité, qui va de pair -, on est en droit de se poser certaines questions.

Bien sûr, tenir la ligne éditoriale est fondamental pour la réussite de la presse. Mais elle ne justifie pas une telle prise de position, encore davantage si c’est pour démolir la manifestation du 26 mai en une et en première double-page, deux jours de suite.

Si les analyses qui se présentent à nous, simples lecteurs, sont biaisées dès la base, comment s’étonner du peu de confiance accordé aux médias ? Comment s’étonner du lien de dépendance qui unit trop souvent les Français à leur JT ? De l’absence de recul sur les informations ? Pire, du « tous pourris » revendiqué par un nombre croissant d’entre nous ?

Encore une fois, nous devons nous-mêmes effectuer ce travail. Quel dommage ! Car, ce sont les journalistes qui y sont habilités, et qui sont le mieux capables en la matière. Mais, si vous n’avez pas le courage – ou le temps – de jongler avec les informations, une autre possibilité s’offre à vous : rééquilibrez la balance et informez-vous dans le camp opposé. Par exemple, Famille Chrétienne titre ce jeudi, et depuis trois semaines, « Ce n’est que le début ». Que voulez-vous, on ne se refait pas.

6 Commentaires

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6 réponses à “« Le Monde », exemple d’une presse orientée sans en avoir l’air

  1. Peut-on réellement apporter un intérêt, ou de l’importance, à un journal chrétien parlant de politique?

  2. Salut,

    Je trouve que ce sujet est très intéressant. Il a d’ailleurs fait l’objet d’une multitude de débats durant mes études de journalisme. Et je dois t’avouer que j’ai longtemps partagé tes inquiétudes concernant cette presse qui ne se contente pas de rapporter les faits, mais qui se permet en outre de les commenter allégrement et de les présenter sous le prisme de convictions politiques que je jugeais, à l’époque, peu conciliables avec un métier qui exige objectivité et exactitude factuelle.

    Ensuite, comme tu le soulignes d’ailleurs, je me suis fait à l’idée que chaque rédaction veillait au respect d’une ligne éditoriale avec laquelle tout journaliste se doit d’être en accord. Ce n’est pas un hasard si, lors des débats télévisés par exemple, un journaliste du « Figaro » défendra la droite et un journaliste de « Libération » fera de même avec la gauche (je caricature évidemment, mais le principe est là). Une fois cette ligne éditoriale connue du lecteur-spectateur-auditeur de presse, celui-ci peut en toute connaissance de cause choisir le ou les organe(s) médiatiques les plus adaptés à ses attentes. Cela constitue une authentique richesse, permettant notamment de confronter les points de vue et de mettre en saillie ce fameux pluralisme tant convoité.

    En réalité, si les journalistes se bornaient à l’analyse factuelle, sans y apporter leur sensibilité personnelle, tous les papiers grouilleraient de chiffres, de statistiques et d’événements, qu’aucune mise en perspective ou réflexion personnelle ne viendraient rehausser. Et puis, il y a cette question, fondamentale : peut-on réellement se montrer objectif en tant qu’être pensant devant traiter une matière qui heurte nos convictions personnelles ?

    • A mon avis, ce n’est pas une question de sensibilité personnelle, sauf pour les articles d’opinion, mais bien d’une analyse. C’est d’ailleurs pour cette raison que de tels faits me dérangent. Pour ce qui est du Monde, je trouve qu’il a un peu trop tendance à gauchiser sa ligne éditoriale, surtout quand il est LE journal de référence, tant pour les lecteurs que pour les journalistes – comme on me l’a réellement confié.

      A propos de l’objectivité en général, je suis tout à fait d’accord avec ce que tu dis ici : par essence, l’humain est tout sauf objectif. C’est ce même problème qui se pose en ce moment avec l’impartialité de la justice…

  3. « Le Monde » est effectivement LA référence de la presse francophone tous pays confondus. Et le problème n’est pas tant la « gauchisation » présumée du quotidien, ni même d’ailleurs la présence d’opinions personnelles. Cela fait partie de la valeur ajoutée propre au travail journalistique. L’essentiel, c’est que le « consommateur » (terme à la mode) de presse puisse clairement identifier ce qui relève du factuel et du subjectif.

    Cela dit, il existe partout en Europe des journaux d’une neutralité – presque – totale : les gratuits. Je laisserai à chacun le soin de juger de leur qualité et, plus généralement, de leur utilité…

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